Ce que nous pouvons savoir de la « vie de Jésus » est contenu dans les Évangiles. Quant aux informations qui viennent d’ailleurs, dit un des meilleurs connaisseurs de la question au point de vue historique (Harnack), « on pourrait les écrire sur une page in-quarto ».

Mais quelles sortes de documents sont les Évangiles ? Le quatrième, l’Évangile de saint Jean, diffère tellement des autres que ceux qui étudient le christianisme au point de vue historique en arrivent à cette conclusion : « Si Jean possède la véritable tradition sur la vie de Jésus, les trois autres Évangélistes (les Synoptiques) ne sont pas des sources sûres. Si au contraire les Synoptiques ont raison, l’Évangile de saint Jean doit être repoussé comme source historique ». Cette assertion est d’une incontestable vérité pour l’historien.

Döbröntei Zoltán, Un bon berger , 70x100cm, huile sur toile. ©Döbröntei Zoltán, Napút Art Academy

Dans ce livre, où il s’agit du contenu mystique des Évangiles, ce point de vue ne doit être ni reconnu, ni repoussé. Mais une chose doit être prise en considération: « Jugés au point de vue de la concordance, de l’inspiration et de la plénitude d’information, ces écrits laissent beaucoup à désirer, et, selon la simple mesure humaine, ils sont entachés de nombreuses imperfections. » Tel est le jugement d’un théologien chrétien. Pour celui qui se place au point de vue « mystique » et recherche de ce point de vue la source des Évangiles, les choses qui s’y contredisent s’expliquent aisément. Dans une interprétation de ce genre, on peut trouver une harmonie supérieure entre le quatrième Évangile et les trois autres. Car tous ces écrits ne peuvent pas être considérés comme des traditions historiques dans le sens ordinaire du mot. Ils ne prétendaient pas donner une biographie historique. Ce qu’ils voulaient donner, c’était une vie typique (intérieure) d’un fils de Dieu selon la tradition des Mystères, appliquée à la personne et à la vie (extérieure) de Jésus. Les matériaux essentiels n’étaient donc pas empruntés à l’histoire, mais à la tradition. Or ces traditions ne concordaient pas littéralement dans tous les lieux où les Mystères étaient cultivés. Néanmoins, cette concordance, entre les traditions mystiques de nations diverses et fort éloignées les unes des autres, était assez grande pour que les bouddhistes aient raconté la vie de leur Bouddha à peu près de la même façon que les Évangélistes ont raconté celle du Christ. Toutefois il y a des différences entre les récits de ceux-ci. Pour les comprendre, il suffit d’admettre que les quatre Évangélistes ont puisé en diverses traditions mystiques. La haute personnalité de Jésus apparaît déjà dans ce fait qu’il a été capable d’éveiller la foi en des scribes appartenant à quatre traditions diverses des Mystères. Si grande fut la foi, qu’il éveilla en eux par ses actes et par ses paroles, que chacun d’eux se persuada qu’il répondait au type de son initiation. Et c’est d’après cette initiation qu’ils peignirent son développement d’âme tout en conservant les faits essentiels de sa vie publique. Si les trois premiers Évangiles (les Synoptiques) racontent la vie de Jésus d’une manière analogue, cela ne prouve qu’une chose, c’est qu’ils ont puisé dans les mêmes traditions des Mystères. Le quatrième Évangile est saturé des idées du philosophe religieux Philon. Cela ne prouve pas autre chose si ce n’est que cet Évangile a été rédigé selon la même tradition.

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